Depuis les Antilles, hommage à Christian LOISEAU.

La FPMNS rend hommage à Christian Loiseau, collègue MNS de Martinique toujours présent dans les combats qui nous unissent. Nous publions ce texte lu le 24 septembre 2025, jour de ses 72 ans, lors de ses funérailles aux Terres Sainville.

Christian. Michel pour certains. Papa pour ses enfants. Papy pour ses petits-enfants. Doubry pour ses amis. Parrain pour ses filleuls et aussi un nombre incalculable d’entre nous. Il portait bien des noms, mais était animé d‘une seule et même énergie : celle d’un homme profondément libre, engagé, passionné, adepte de TTS toujours… très swef. Troisième d’une fratrie de quatre enfants, il a donné le ton dès sa naissance ; accouchement extrêmement difficile, rendu possible finalement grâce à la Vierge Marie, pilier de la spiritualité d’Olympe et Bernadin, ses parents. Cet évènement aurait dû avoir empêché la naissance de sa petite sœur, Anne-Marie. En tout cas il est certainement à l’origine du lien indestructible qui a soudé ce duo : « Tim épi Bang ». Inséparables depuis l’enfance, bien que souvent en désaccord, explosif mais éphémère, fruit de l’expression franche de forts caractères imprégnés d’entêtement. Très tôt, Christian a manifesté sa volonté d’évoluer hors des sentiers battus. Il se qualifiait lui-même de « vagabond », au sens noble du terme : Il était fier de revendiquer, en plus de l’éducation reçue dans sa famille, celle de la rue, la populaire.

Il aurait pu avoir dérapé si sa mère, dans sa grande sagesse, et avec tout son amour n’avait pas décidé de le changer de cadre. C’est ainsi que Christian s’est retrouvé à la Manzo, chez sa Tante Yvette pendant une année pour finir sa scolarité au collège. L’expérience vécue dans ce quartier rural où il a été accueilli comme un fils a eu un impact positif et incommensurable sur sa vie. Et le voilà lancé dans la vie, d’abord le CREPS, en Guadeloupe où il a reçu sa formation de Professeur d’Education Physique et Sportive, en parallèle, il passe son diplôme de Maître-Nageur Sauveteur puis, direction la Guyane pour le service militaire, après maints reports d’engagement. Là, il s’est vu confier la responsabilité de la piscine et l’enseignement de la natation, au point qu’il n’a jamais porté l’uniforme. Cette présence sur le continent fut pour lui l’occasion de connaître le Surinam, le Brésil et surtout la Guyane et sa Nature dense, dont il a su bénéficier de l’énergie au point d’y enraciner une partie de son cœur. Cette expérience ineffable, combinée à celle acquise lors de ses études et par la suite les navigations dans la Caraïbe, a développé chez lui une connaissance poussée de l’être humain, tant sur le plan physique qu’émotionnel et voir même spirituel. C’est de là que s’est développée sa compréhension des autres qui l’a rendu si précieux pour tant de personnes. Un homme à l’écoute, bienveillant, toujours de bons conseils. Il exercera dans cinq établissements scolaires, mais marquera surtout le COPES et RAMA. Des générations d’élèves gardent de lui un souvenir ému. Il n’était pas seulement un prof, il était un repère, un modèle, un confident, parfois même, un ami, un frère, un père.

En digne fils de son père, Capitaine fils de Marin Pêcheur, sa véritable passion, son élément, c’était la mer. « Savoir nager, c’est bien se porter », était son leitmotiv. En mer principalement, mais aussi en piscine, si l’on se réfère à ses débuts au Marigot où il a contribué avec son collègue Michel Philippi à propulser la natation dans le Nord de l’île dès 1974. Christian a transmis le goût de la mer à des milliers de personnes, des petits, des grands, et surtout à ceux qui pensaient ne jamais pouvoir y mettre les pieds ou s’éloigner du rivage. Certains, aujourd’hui, nagent au large, font des kilomètres. Elles et Ils ont une reconnaissance éternelle pour Christian qui a changé leur vie déjà adulte parce qu’il leur a fait vaincre leur phobie des profondeurs.

Il s’est engagé à professionnaliser le métier, à lutter contre les noyades, il a œuvré à l’installation de postes de secours sur les plages de Martinique, développé des écoles de natation en mer avec entre autres son collège et ami Duval. Sainte Luce lui doit l’initiation de l’aquagym en mer. Vice-président de l’association des Maîtres-Nageurs Sauveteurs de Martinique, Secrétaire général section Martinique du SNPMNS Syndicat National Professionnel des Maîtres-Nageurs Sauveteurs, il n’a jamais compté ses heures.

Son engagement ne s’arrêtait pas là. Éclaireur de France dans sa jeunesse, il poursuivra plus tard, au Centre Culturel de Trénelle, participant au rayonnement du quartier, à l’ALCS du Morne des Esses aux côtés du Père Mirta, ouvrant des horizons à des jeunes, les emmenant jusqu’à Paris ou dans la Caraïbe pour les vacances. On le retrouve aussi au Club Nautique du Marin où il a œuvré avec entre autres son ami René Baudin à la démocratisation de la voile en habitable. Christian a été un excellent pédagogue, un militant de terrain et efficace. Amoureux de l’image, passionné de photographie, il a collaboré à de nombreux projets audiovisuels, parfois avec les plus grands noms de l’époque.

On le croisait souvent sur sa moto, toujours avec ses lunettes de soleil. Christian était Père de deux enfants, Olympe, sa fille, et son fils Alain qui lui a donné 4 petits-enfants et 2 arrière-petits-enfants. Il avait 5 filleuls « officiels », et une multitude d’autres qu’il a pris sous son aile, naturellement. Fin mélomane, danseur hors pair qui appréciait énormément valser avec Marie, sa sœur aînée il a su transmettre sa passion du boléro, de la musique traditionnelle et des rythmes caribéens. Avec son frère Daniel, professeur de Musique, il aimait échanger pendant des heures sur la technique musicale. Amateur de voyages, de sorties en voilier avec ses amis du Marin, il rêvait d’un tour du Monde et d’un tour de France de la gastronomie. Ses rêves, nous tacherons de les réaliser pour lui. Il avait une consigne pour ses amis qui partaient en voyage : « Tu me ramènes deux bières de la région ! » Christian était un épicurien, amateur de vin, de champagne, de bonne chair, il avait ce goût de la vie, ce plaisir des sens, cette façon d’honorer chaque instant. Avec ses frères de cœur, les « Doubrys », il fonde le TTS Club – Toujou Trè Swef. Un nom qui en dit long sur sa philosophie : profiter et célébrer. Comment ne pas penser à ses rituels « Daaachinou » qui étaient bien plus qu’une façon de trinquer. Baptisé ici, à l’église des Terres Sainville, il avait un lien très fort avec la Vierge Marie et Sainte-Rita. Enfant, il matait le catéchisme, essayant même d’arnaquer sa mère… mais au fond, sa foi était grande. Et ces dernières années, il a vu, compris, et accepté la toute-puissance et la miséricorde de Dieu. Il le disait souvent, les larmes aux yeux, à sa fille Olympe. Après un long combat silencieux, discret comme toujours, il s’en est allé pour le Voyage sans retour. Aujourd’hui, en ce jour particulier où nous aurions dû lui souhaiter un joyeux anniversaire,nous lui disons merci.

Merci pour la vie qu’il a menée. Merci pour tout ce qu’il a transmis. Merci pour les souvenirs qu’il nous laisse, qui résonneront longtemps sur les plages, sur les terrains, en mer, au rythme d’un boléro ou d’un éclat de rire partagé. Christian, Michel, Doubry, Parrain, Papy, Papa… Ton corps physique s’est éteint, mais l’essentiel de toi restera toujours vivant, solaire. Va maintenant retrouver tous ceux qui t’attendent dans une autre dimension, et fais une blague avec eux, de notre part, une de celles dont tu étais expert.

Have a good trip Christian !